« Comme l’immense majorité de nos confrères, nous ne sommes pas avocats, nous vivons avocats »

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Dans le cadre de l’élection pour le renouvellement au tiers des membres du Conseil de l’Ordre du barreau de Paris des 30 novembre et 1er décembre 2021, Le Monde du Droit a interrogé les candidats Jean-Marie Viala et Edith Lagarde-Bellec.

Pourquoi vous présentez-vous ?

Tout est parti d’un constat : nous sommes des acteurs majeurs d’un État de droit et pourtant notre profession est malmenée comme rarement elle l’a été.

Les réformes des procédures s’enchaînent au prétexte de la modernisation de la justice, mais tendent, en réalité, bien souvent à désengorger les tribunaux, au détriment du droit de tout citoyen à un procès équitable. Sont ainsi créées de véritables chausse-trappes que les avocats s’efforcent d’éviter, quand ne sont pas transférées sur les cabinets des tâches administratives qui jusque-là incombaient aux greffiers et donc à l’État. Les relations avec les magistrats se sont très fortement dégradées ces dernières années, ce qui nous inquiète car c’est la justice elle-même qui en pâtit. A cela s’ajoute une paupérisation de la profession, dont le Sénat s’était alarmé il y a plus de dix ans, et qui fragilise les cabinets.

En 2020, une étude a révélé qu’un nombre alarmant de confrères souhaitaient quitter la profession, découragés.

Pour nous qui partageons la passion de notre métier et qui, comme l’immense majorité de nos confrères, si ce n’est la totalité, ne sommes pas avocats mais vivons avocats, cette situation n’est pas acceptable et nous a donné l’envie d’agir et de nous impliquer au sein de l’Ordre, notre maison commune, pour restaurer la dignité des avocats, condition de l’exercice heureux d’une profession si noble.

D’où vous est venue l’idée d’un tel binôme ?

Amis de longue date, à la complicité quasi-filiale, nous avons l’habitude de partager nos expériences et nos réflexions sur l’évolution de la profession, réflexions qui sont nourries des échanges que nous aimons, l’un comme l’autre, avoir avec nos confrères. Intervenant dans des domaines distincts puisque l’un est pénaliste tandis que l’autre est civiliste, nous avons une vision complémentaire de notre profession.

Quelles sont les idées que vous aimeriez défendre dans le cadre de votre élection ?

Nous avons 2 ambitions. D’une part, restaurer la dignité de l’avocat, auprès des pouvoirs publics et des magistrats et revaloriser notre fonction. D’autre part, consolider la cohésion de notre Barreau. La très belle mobilisation dont a fait preuve la profession en général et le Barreau de Paris en particulier à l’occasion du projet de réforme des retraites a montré que notre cohésion est une force qui doit être mise au service de chacun. Notre solidarité doit être employée pour aider les confrères les plus fragilisés, pour assurer aux jeunes avocats une formation adaptée à la pratique de notre métier, pour protéger nos cabinets contre le « dumping » judiciaire et juridique qui ne profite ni aux avocats, ni aux justiciables.

Quelle est votre vision de l’avocat de demain ?

L’avocat de demain est dans son temps. Il dispose des outils numériques qui lui permettent de se concentrer sur son cœur de métier : le conseil et la défense mais il n’est pas lui-même « dématérialisé » car sa fonction est respectée et valorisée. C’est un avocat heureux, fier d’exercer cette profession.

Propos recueillis par Léa Verdure