Une déclaration d’appel enregistrée par le RPVA est-elle recevable dans une procédure sans représentation obligatoire ?

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Romain LafflyRomain Laffly apporte des précisions sur la recevabilité d'une déclaration d’appel enregistrée par le RPVA dans une procédure sans représentation obligatoire.

Si, par application de l’article R. 13-47 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique alors applicable, la saisine de la cour d’appel doit être effectuée par acte extrajudiciaire ou par déclaration faite ou adressée au greffe de la cour, la déclaration d’appel régularisée par le RPVA est également recevable.

Civ. 2e, 10 nov. 2016, FS-P+B, n° 14-25.631

L’avocat d’une société d’économie mixte relève appel d’un jugement du juge de l’expropriation au moyen du réseau privé virtuel des avocats (RPVA). La procédure devant la cour d’appel étant sans représentation obligatoire en cette matière, la cour d’appel, lors de l’audience, demande au conseil de l’appelante de produire, en cours de délibéré, un justificatif de l’envoi en recommandé avec accusé de réception de la déclaration d’appel conformément à l’article R. 13-47 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique. Cet article, abrogé depuis, disposait en effet que la saisine de la cour d’appel s’opérait par acte extrajudiciaire ou par déclaration faite ou adressée au greffe de la cour dans le mois de la notification du jugement, l’article R. 311-24 nouveau précisant désormais que "l'appel est interjeté par les parties ou par le commissaire du gouvernement dans le délai d’un mois à compter de la notification du jugement, par déclaration faite ou adressée par lettre recommandée au greffe de la cour".

L’appelant n’étant pas en mesure de rapporter cette preuve, la cour d’appel de Versailles déclare l’appel irrecevable. La société d’économie mixte forme un pourvoi contre l’arrêt et la Cour de cassation, par application combinée des articles R. 13-47 susvisé, 748-1, 748-3 et 748-6 du code de procédure civile ainsi que de l’arrêté du garde des Sceaux du 5 mai 2010 relatif à la communication électronique dans la procédure sans représentation obligatoire devant les cours d’appel, casse et annule en toutes ses dispositions l’arrêt rendu.

On déduit du seul visa de ces textes que la Cour de cassation a entendu rappeler que, si la procédure devant la chambre de l’expropriation est sans représentation obligatoire et que l’utilisation du RPVA n’est donc pas imposée, l’appel pouvait être valablement régularisé par voie électronique. En effet, si les articles 748-1 et suivants fixent les modalités de la communication par voie électronique, l’article 748-6 fait directement référence à l’arrêté du garde des Sceaux pour fixer les garanties nécessaires à cette utilisation. L’article 1er de cet arrêté, qui détaille également les procédés d’utilisation du RPVA et du réseau privé virtuel de la justice (RPVJ), précise que, "lorsqu’ils sont effectués par voie électronique entre auxiliaires de justice assistant ou représentant les parties ou entre un tel auxiliaire et la juridiction, dans le cadre d’une procédure sans représentation obligatoire devant la cour d’appel, les envois et remises des déclarations d’appel, des actes de constitution et des pièces qui leur sont associées doivent répondre aux garanties fixées par le présent arrêté".

Or, dans la mesure où l’arrêté prévoit bien, dans la procédure sans représentation obligatoire devant la cour d’appel, un dispositif sécurisé pour "les envois et remises des déclarations d’appel", l’avocat de la société appelante avait parfaitement la possibilité de relever appel via le RPVA. 

La portée de cet arrêt apparaît donc générale pour les procédures sans représentation obligatoire devant la cour et précisons que dans le contentieux du droit du travail, certaines cours d’appel avaient déjà, au visa même de l’arrêté visé supra et de l’article 748-1 du code de procédure civile, estimé que la déclaration d’appel faite par le RPVA devant la chambre sociale était parfaitement recevable. Mais rappelons que ce qui était une simple faculté est devenu une obligation pour la matière sociale puisque le décret n° 2016-660 du 20 mai 2016, applicable pour les déclarations d’appel formées à compter du 1er août 2016, exige désormais que l’appel interjeté par un avocat contre une décision du conseil de prud’hommes soit, à peine d’irrecevabilité relevée d’office, formé par voie électronique par application de l’article 930-1 du code de procédure civile. Et, si le débat sur l’appel interjeté par RPVA dans les procédures sans représentation obligatoire semble clos, l’avocat n’en sera pas plus tranquille pour autant puisque, le même jour, la Cour de cassation a jugé que les écritures, notifiées par le RPVA devant la chambre de l’expropriation, étaient, elles, irrecevables (Civ. 2e, 10 nov. 2016, n° 15-25.431, Dalloz actualité, 1er déc. 2016, obs. R. Laffly ).

Romain Laffly, avocat associé – Lexavoué Lyon, spécialiste en procédure d’appel